Dans un arrêt rendu le 24 juin 2020 (n°19-12.261), et dont la solution aurait mérité une publication au Bulletin, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a consacré la possibilité pour le juge des référés d’ordonner le maintien d’une relation contractuelle, et ce, malgré que la notification de la résiliation de cette relation intervenue.
Dans le cas d’espèce, le juge des référés avait obligé le fournisseur, qui prétendait ne plus être en mesure de fournir les produits compte tenu de la hausse du prix des matériaux et du refus de renégociation des prix par l’acheteur, à honorer les commandes passées et à venir de son acheteur, et ce, jusqu’au prononcé de la décision à intervenir au fond sur le bienfondé de la résiliation qu’il avait notifiée à son acheteur.
Le juge des référés justifiait sa décision sur le fondement de l’article 873 du Code de procédure civile et des pouvoirs qui lui sont donnés sur ce fondement pour ordonner les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.
Si on pouvait s’attendre à ce que la Cour de cassation censure une telle décision qui obligeait l’une des Parties à se maintenir dans une situation juridique qu’elle estimait déséquilibrée et à maintenir un contrat qu’elle avait pourtant résilié, les juges de la Cour de cassation, de manière très surprenante, approuvent ici la solution retenue par le juge des référés.
Ils consacrent ainsi le pouvoir de ce dernier d’ordonner le maintien d’une relation contractuelle résiliée et d’obliger le fournisseur à une obligation de faire qu’il juge pourtant impossible.
En soulignant que la « possible illicéité du comportement de la société X » justifiait le maintien de la relation contractuelle, la Cour de cassation rappelle par ailleurs que les mesures « conservatoires » et de « remise en état » peuvent être prononcées même en cas de contestation sérieuse de l’une des parties, et même si le bienfondé de la réclamation du demandeur n’a pas été encore consacré par les juges du fond.
Cet arrêt consacre ainsi l’importance et l’étendue des pouvoirs conférés au juge des référés sur le fondement de l’article 873 du Code de procédure civile, et met en lumière l’arsenal juridique illimité qui s’ouvre à lui pour prévenir un dommage imminent.
Cette solution sera manifestement très utile au partenaire commercial qui souhaite prévenir le dommage important qu’il est susceptible de subir en cas de rupture brutale des relations commerciales établies, de pratique commerciale déloyale, ou plus généralement en cas de résiliation abusive de son contrat.